vendredi 24 avril 2020

Aporie en période de pandémie

Plus que d'habitude, il me semble qu'en ce moment le monde se répartit en deux catégories aux contours bien distincts : Ceux qui savent tout sur tout, et réciproquement, et qui l'affirment haut et fort, et puis ceux, auxquels j'ai la prétention d'appartenir, qui ne savent pas grand-chose sur presque rien, ou le contraire, mais qui se taisent ou qui chuchotent...

Pourtant, je reconnais qu'il m'est déjà arrivé d'affirmer ici-même que ça n'est pas parce qu'on avait rien à dire qu'il fallait fermer sa gueule. Alors..? Alors, comme l'a si bien chanté le très nobelisé Bob Zimmerman, les temps changent, et dans le domaine de la statistique, avec cette pandémie on a, je crois, atteint le record, absolu et toutes catégories, de conneries proférées à la minute. Autant de bêtises affirmées avec force, jour après jour, par nombre d'auto-proclamés "experts", d'autant plus sûrs de leur fait que leur "expertise" est bien souvent totalement improvisée sur l'instant, et  qui, eux, savent, évidemment... Alors, pour une fois, j'apprécierais que ceux qui n'ont rien, mais alors strictement rien à dire, la ferment !

Les premiers, ceux qui squattent les plateaux télé, les ondes radios, les réseaux sociaux en tous genres, les tribunes, les estrades, les journaux et les magazines imprimés d'où ils pérorent et prétendent faire l'opinion, quitte même à se contredire, d'un jour l'autre, sans pour autant jamais prendre le temps ou la distance nécessaire pour se questionner, voir, soyons fou, se remettre en question. Et puis les autres, tous ceux qui n'ont surtout pas la prétention de savoir et qui assument, comme je le fais, le caractère aporétique, mais discret, de leur démarche. On a le droit, si l'on ne cherche pas à imposer ses opinions aux autres, d'être parfois aux prises avec les contradictions de sa pensée. L'aporie peut même apparaître parfois comme une forme salutaire de doute.

Et dans le registre aporétique, je souhaite te livrer, mais uniquement, et tu comprendras aisément pourquoi, à titre d'illustration, la réflexion suivante qui m'est venue tantôt : "Tous les médecins se trompent tout le temps. Le professeur Raoult a raison..." Mais celle-là j'aurais peut-être dû la garder pour moi, tant certains sujets sont aujourd'hui si chauds que celui qui se risquerait à les aborder pourrait bien finir par s'y brûler. Comme l'a si justement écrit Cioran, nous sommes sans-doute entrés dans l'un de ces moments où l'"on ne peut rien dire de rien".

En période de pandémie, de partager tes réflexions aporétiques tu te garderas. So long, friend!

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