jeudi 31 octobre 2019

Couleur de la colère

Ce soir, la nausée le dispute à la rage. Oui, la rage. Pas seulement la colère mais bien la rage, celle qui donne des idées de violence, des envies de sang, un désir de destruction bien massive. Et d’où me vient, me diras-tu, ce soudain accès de fièvre?

Je suis tombé, en rentrant en auto, sur une émission de radio surréaliste, un temps d’antenne consacré aux "frugalistes"! Une manière de transcendance de la crétinerie ou quand la connerie atteint au sublime.

Un type de 40 ans, invité comme témoin, expliquait très doctement et sans rire, à grand renfort d’anglicismes qui trahissaient tout autant une influence new age californienne que le reflet du degré ultime de sa parisienne boboïtude, un type donc qui annonçait qu’il avait choisi de changer de vie pour devenir "frugaliste". Fruga quoi ?!!!! Je ne m’énerve pas, j’explique; mais alors là... Celui-là on avait juste envie de lui arracher la langue avec des pinces chauffées à blanc pour lui fermer son claque-merde à débiter des sornettes.

Ex-banquier d’affaire (tout un programme...), l’enflé suffisant expliquait sans aucune retenue, qu’après avoir gagné beaucoup (sic!) d’argent, il avait décidé d’arrêter de travailler. Une façon à ses yeux de lutter contre les excès de la société de consommation en abordant les rives de la décroissance. Faire pauvre pour être comme les autres, comme la grande majorité de l’humanité qui vit sous le seuil de pauvreté. Être exemplaire jusqu’à l’expiation ? J’aurais pu éventuellement comprendre si, se retirant du monde dans le dénuement, il avait rejoint son ermitage ou même s’il avait choisi le silence et la prière de la vie monastique. Mais non, ça c’est dans doute trop difficile et n’est ni Henry-David Thoreau ni François d’Assises qui veut, car - Ah oui! J’oubliais de le préciser - le gandin avait investi toutes ses (généreuses) éconocroques en bourse et annonçait bravement vivre "assez confortablement" (re-sic!) des revenus de son (important) patrimoine. Frugalité avez-vous dit ? Les rentiers ont vécu, place aux frugalistes! 

Mais de qui se moque-t-on ? L’indigence n’a pas de prix, ou plutôt si, elle en a désormais un, et il est réservé à ceux qui en ont les moyens. S'il s'agissait de se racheter une belle conscience après avoir gagné beaucoup de fric, on pourrait éventuellement comprendre. J’aurais même pu accepter l'idée qu’il veuille se consacrer quelques années à un beau projet, aux autres, à ses enfants... Mais d’enfant il n’y avait; pas même un projet... Juste le choix, assumé, d’arrêter de bosser pour se consacrer avant tout à lui-même. Comble d’un narcissisme non assumé se parant des oripeaux de la nouvelle bien-pensance, ou peut-être tout simplement égotisme parfaitement revendiqué au nom de je-ne-sais quelle méthode new-age de développement personnel à la mode. À gerber...

Ce soir, ma rage est rouge, rouge sang même! De cette écarlate couleur dont se pare la colère. Rien, mais alors rien n’excusera jamais une telle dose de cynisme. Rien!

vendredi 11 octobre 2019

10 ans! Et toujours rien

En écrivant ces quelques lignes, je réalise que cela fait 10 ans que je partage avec toi, ici, ami lecteur, mes réflexions, mes questionnements et  mes doutes.

Loin de l'archétype du savant, du professeur, celui qui sait, ou du chercheur, celui qui trouve, il me plaît de me considérer parfois comme un cherchant, celui qui doute. Et c'est en quelque sorte l'ombre de mes hésitations, de mes tâtonnements et de mes incertitudes que, au fil du temps qui passe, j'essaie de communiquer en les proposant en partage, à la lumière de ce blog. Des doutes, oui mais jamais - en tout cas je m'y efforce - de spéculations, tant ma crainte est grande qu'elles n'entraînent avec elles des projections qui rendent alors très difficile la perception de la réalité, et surtout celle de l'autre.

Depuis l'automne de l'année 2009, l'évocation des souvenirs a commercé avec une réflexion qui m'apparaît aujourd'hui comme une manière d'ouverture à la liberté de chercher au-delà de la perception des sens, de s'ouvrir au monde, dans une forme d'exercice d'oubli du savoir que nous pensons avoir acquis des choses. La recherche d'un troisième terme échappant à la lecture simplement binaire, analytique et causale du monde, qui est le fruit de notre éducation, pour, de temps en temps, oublier le cartésianisme et accepter l'irrationnel; une démarche que j'ai envie de qualifier, bien que détachée de toute religiosité, de spirituelle (d'aucun dirait mystique), allant même parfois jusqu'à une forme d'acceptation de l'inconcevable.

Album beaucoup écouté...
En disant cela, je pense aux questions de coïncidences et de synchronicité que nous avons récemment abordées en cours (et oui, me voici de retour sur les bancs de l'école...) et me dis que si l'hypothèse de la synchronicité avancée par Jung ne permet sans doute pas, à elle seule, de résoudre la question d'un ordre sans cause, elle éclaire d'un jour nouveau certaines de mes propres réflexions et met en lumière le fait que chaque rencontre, chaque "coïncidence" a participé à la satisfaction d'un besoin très certainement inconscient mais constitutif d'un processus d'individuation.

Alors, quelle est au fond l'importance de déterminer la cause de cette soudaine envie, goût devenu besoin, puis addiction même, de faire partager mes vaines réflexions, ces tout petits riens ? Et de poursuivre cette ineptie pendant 10 ans ? En posant cette question, je comprends qu'il n'est pas absolument indispensable, au risque de l'aporie, d'en chercher la réponse.

10 ans! Et toujours rien...