dimanche 26 août 2018

Ne rien attendre

On dit que les périodes de rentrée peuvent être source d'angoisse.
Peur de la nouveauté, de l'échec ou simplement de la confrontation à l'inconnu...

En bon anxieux qui se respecte, je m’attends toujours au pire et n’anticipe généralement que le mauvais, que ce soit de manière consciente ou pas. Cette angoisse devant le vide de l’existence peut s'assimiler, je m’en inquiète parfois, à une forme de pessimisme, confinant même, dans les périodes les plus sombres, à une manière de fatalisme.

Pourtant, je ne me reconnais aucunement dans l'idée de ne considérer, comme les stoïciens, la vie qu’au seul prisme du destinisme et je ne veux pas me contenter d’attendre, accroché tel un lichen à son rocher, assujetti aux contingences de la nature et aux aléas de l'univers, que la marche inéluctable d’un destin auquel je serais entièrement soumis fasse son œuvre, en abandonnant toute idée de lutte contre l’adversité. Car penser que tout est écrit et attendre que la chance passe c’est ne rien attendre. Autant guetter la mort !

L'universalité du destin n'exclut en rien l'action individuelle et mieux vaut toujours agir - au risque de l'aventure - pour avancer, quitte à se trouver confronté, par un curieux paradoxe, à défier notre destin mortel, puisque le comble du fatalisme c’est le mépris même de la mort. Notre liberté n'est pas seulement celle qui nous permettrait de réagir aux affres d'un sort déterminé par toutes sortes de causes, mais bien plutôt celle de pouvoir agir pour influer sur le sens même que nous voulons donner à notre vie. Quitte à devoir nous confronter à l'angoisse née du vide qui semble nous séparer des choix que nous pouvons opérer pour agir. L'angoisse ne serait-elle, dès lors, qu'une forme d'expérience de la  liberté ? 

J’ai lu récemment que le corps humain, à l’instar des cucurbitacées, était composé en grande majorité d’eau (jusqu’à 90%...). Notre état d’inquiétude émotionnelle fait donc de nous - de facto - des sortes de grosses courges anxieuses. Des grosses courges, oui, mais des courges libres et agissantes.


Cher ami lecteur, je te souhaite une bonne rentrée.

lundi 13 août 2018

Rien n'est plus cher que nos souvenirs


Après une longue marche autour de la presqu’île de la Revelatta, déjeuner hier au Mara Beach, l’une de ces paillottes nichées au fond d’une baie tranquille dont seule l’île de beauté à le secret. On croit qu’elles ont toujours été là ces cases de plage, tant  – et c’est le cas ici – elles ont fort heureusement souvent su s’intégrer dans le paysage, s’y fondre et n'en rien dénaturer la beauté (sauf, peut être aux yeux de quelques bobos grincheux et autres bio-conservateurs). Pourtant l'administration est là qui veille et que rien ne semble perturber dans ces certitudes et l'assurance de la justesse de son action contraignante et normative, pas même le piteux souvenir de quelque grotesque "action d'éclat" (Boom !) préfectorale...

Au cœur de notre hiver parisien, nous avions été alertés par des amis sur le risque de disparition pour cause administrative qui pesait sur cet établissement. Nous fûmes nombreux alors à nous mobiliser pour que cela n'advînt pas.

J’ai lu ces jours derniers que dans le Var, à Pampelonne, la plage des jumeaux était elle-aussi menacée de fermeture. Que de souvenirs sur cette plage qui était, loin du snobisme du Club 55 ou des exhubérances exotiques d'autres établissements à la clientèle de nouveaux riches, ma préférée lorsque je fréquentais encore le golfe de Saint Tropez... Chaton venait de se lancer dans la peinture, les jumeaux étaient encore deux. Nous y avons fêté quelques anniversaires au mois de mai et nous y avons joué au Backgammon avec Renaud qui terminait ses études de médecine et venait tout juste de s’engager en politique. 

Partie de Backgammon 

Il nous est même arrivé (n’est-ce pas Jean et Pierre-Jean?) d’y fêter parfois l’an neuf sur le sable...

Il me revient qu’un jour j'avais croisé sur la plage Marc Cerrone. Impossible dès lors de ne pas évoquer le souvenir de mes 1ers achats d’import US dans la boutique qu’il avait ouverte au centre commercial de Belle Épine. Je lui rendais visite chaque fois que mes parents m’emmenaient y faire des courses. J’y ai découvert le rythme et la soul des tubes de KC & the sunshine band ou encore l’inégalable groove funky d’EWF avec « Fantasy ». La mère de Cerrone, qui habitait alors à Antony dans la rue qui faisait face à notre maison familiale, était coiffeuse dans le salon que la mienne fréquentait. Elles évoquaient parfois son batteur de fils qui, de temps à autre, me faisait rêver en garant sa Porsche 911 devant chez nous lorsqu’il venait en visite familiale. Mais, foin de nostalgie me diras-tu…

La nostalgie tout autant que les souvenirs sont des mensonges qui, dans notre monde, n’existent pas davantage que nos rêves. Pourtant parfois, au détour de l’actualité, ils peuvent prendre la force et la vigueur de l’instant présent en invoquant ce passé qui est dans notre mémoire et qui, comme l’écrit si justement Denis Tillinac dans un éditorial cette semaine, «...nous protège des démons de la désespérance ».

Pas seulement au nom des souvenirs d’un temps passé qui ne sera plus, mais surtout pour toutes les mémoires qui restent encore à écrire, pour lutter contre l'uniformisation, l'ennui et la cafardeuse grisaille que nous réserve trop souvent le quotidien, oui, souhaitons pour l'avenir que, longtemps encore, vivent le Mara Beach et la plage des jumeaux !

Nature défigurée à la Revelatta. Vraiment ?