mardi 17 janvier 2017

Des riens qui grandissent

Le "blue monday". Le  troisième lundi de l'année qui marquait le début de la semaine est censé être le jour le plus déprimant.

La déprime traditionnelle qui marque la fin du weekend y serait accentuée par un ciel gris et peu lumineux, le froid (en janvier, quelle surprise!...), des comptes bancaires au plus bas, en raison des étrennes et des fêtes; et, conséquence des excès lié à la même raison, un léger surpoids sur la balance; fini - déjà ! - les bonnes résolutions du début de l'année, pas envie de se lever ni d'aller bosser... C'est le blues de la mi-janvier !

Moi, mon blues du début de la semaine serait plutôt le fruit de ces petits renoncements qui - parfois - nous affectent, sans même seulement que nous nous en rendions compte. Comme la nouvelle, qui aurait pu passer totalement inaperçue, de ce projet de ratification concernant l'abandon de la souveraineté de la France sur Tromelin (sur quoi ?...).

Si, si, Tromelin! l'île de Tromelin! Une des cinq îles Éparses (Bassas da India, Europa, Juan de Nova, Glorieuses dans le canal du Mozambique et Tromelin)  qui forment - au cas fort improbable où tu l'aurais oublié - le 5ème district des Terres Australes et Antarctiques Françaises. Un (tout) petit morceau de France, une "poussière d'empire", certes, mais un morceau d'une République qui est, comme l'exprime si bien notre Constitution, "Indivisible". Ce qui induit non seulement de mon point de vue l'unicité du peuple français mais porte également que la souveraineté nationale ne saurait s'aliéner.

L'îlot de Tromelin
Située au septentrion de la Réunion et visitée régulièrement par des agents de l'administration des TAAF, l'île de Tromelin découverte en 1722 par un navire français de la Compagnie des Indes, classée en réserve naturelle depuis les années soixante-dix, est  principalement peuplée de colonies d’oiseaux  marins (Frégate du Pacifique, Frégate ariel, Fou masqué, Fou à pieds rouges, Sternes… ) et de milliers de bernard-l’ermite. Territoire au format de confetti, il n'en demeure pas moins que c'est une partie de la France et qu'il bénéficie à lui seul d'une zone économique exclusive presque aussi importante que celle de la métropole. C'est ce territoire, et la richesse patrimoniale considérable qu'il génère en droit maritime, qu'un traité dit «de cogestion» devait céder à l'Île Maurice sans contrepartie aucune si l'Assemblée Nationale l'avait ratifié le 18 janvier. Au-delà du cas d'espèce, ce vote de ratification, s'il était intervenu, risquait de marquer le début du démantèlement de notre domaine maritime (qui est le deuxième du monde avec 11 millions de km²).

Bonne nouvelle! Ce texte, qui avait déjà disparu de l'ordre du jour de la séance publique en 2013 et n'avait jusqu'alors jamais été réinscrit, a de nouveau été retiré par le Gouvernement, sous la pression d'une campagne active qui s'est  notamment déployée sur les réseaux sociaux.

Les îles éparses, les Kerguelen, les Chesterfield, les îlots Hunter et Matthew, Clipperton, Crozet, Saint Paul... Tous ces petits riens, par la grâce des règles du droit international, permettent au drapeau tricolore de flotter sur des terres aux noms très exotiques et font potentiellement de la France une (très) grande puissance maritime.

Alors, sans nostalgie ni regrets d'un empire aux mauvais relents coloniaux, on peut quand même se prendre à rêver et comme l'écrivit en évoquant notre pays avec tant de justesse Cioran, croire encore que  "la France est grande par des riens".

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