As-tu déja réalisé, ami lecteur, amie lectrice, que seules quelques
dizaines d'ancêtres t'ont précédé(e) depuis l'époque où Auguste, premier empereur
romain, régnait en maître absolu sur l'ensemble du bassin méditerranéen en
imposant au monde la pax romana et où, quelque part en
Galilée, naissait Jésus de Nazareth ?
Si l'on veut bien, en effet, considérer
que chaque siècle voit se suivre trois ou quatre générations (en moyenne), et qu'en
mille ans au plus quarante génération se seront succédées, alors seulement quatre-vingt ancêtres au maximum (moins de cent êtres humains! moins que l'addition des joueurs des équipes du tournoi des
six nations...) nous séparent directement de l'époque de la
naissance du Christ (ou nous y relient...) Autant dire, rien du tout à l'échelle de l'univers.
Et si l'on veut alors bien accepter que nous ne sommes pas le
fruit du néant - des êtres issus de rien - peut-être pouvons-nous trouver
un sens à notre humanité par les liens du sang qui nous rattachent, directement, à tous ceux qui nous ont précédé; à leurs joies, à leurs
peines, à leurs angoisses, à leurs désirs. Tel est sans doute le lien de la vie
qu'il nous est si difficile de percevoir et impossible à expliquer. Si notre
naissance nous fait bien advenir dans un univers qui nous semble chaotique et dont le sens nous
échappe le plus souvent, ce qui peut faire sens c'est ce rapport, pas si lointain, ce lien avec ceux qui
nous ont précédé et la conscience que d'autres nous succèderont, ce qui fait
alors de nous des êtres en vie, c'est à dire, en devenir.
Vivre, comme l'a si bien écrit François Cheng [1], c'est advenir et devenir. Et, si je peux m'autoriser un ajout, je dirais aussi : parvenir. Advenir, devenir et parvenir jusqu'à la toute dernière étincelle de vie qui nous sépare de la mort. Car envisager que nous ne sommes pas le fruit du hasard et du néant mais bien reliés à la ligne de vie (la lignée) de ceux qui nous ont précédés, c'est poser clairement la question de la mort. Puisque nous acceptons l'idée que nous ne sommes pas issus de rien, qu'est-ce qui nous contraint à croire que, mort, nous retournerions au néant ?
Vivre, comme l'a si bien écrit François Cheng [1], c'est advenir et devenir. Et, si je peux m'autoriser un ajout, je dirais aussi : parvenir. Advenir, devenir et parvenir jusqu'à la toute dernière étincelle de vie qui nous sépare de la mort. Car envisager que nous ne sommes pas le fruit du hasard et du néant mais bien reliés à la ligne de vie (la lignée) de ceux qui nous ont précédés, c'est poser clairement la question de la mort. Puisque nous acceptons l'idée que nous ne sommes pas issus de rien, qu'est-ce qui nous contraint à croire que, mort, nous retournerions au néant ?
L'heureux paradoxe qui affleure c'est que, bien que nous soyons des êtres humains, c'est à dire des êtres pensants et, partant, conscients de notre état de mortels, rien ne nous condamne heureusement à n'envisager la vie qu'au regard de son inéluctable finitude. Je crois même, comme je l'ai déja ici écrit, que ce qui fait aussi, et surtout peut-être, de nous des êtres humains c'est notre état d'êtres spirituels, c'est à dire notre capacité à aborder la transcendance, en sachant porter notre regard au-delà du perceptible et des possibilités de l'intelligible. Et à considérer parfois l'idée que, d'un certain point de vue, l'univers n'est peut-être pas aussi désordonné qu'il y paraît. Un ordre né du chaos...