mardi 27 mars 2018

Je n'en reconnaîtrai rien

En me rendant au travail, j'ai traversé ce matin la place Denfert-Rochereau sous une fine ondée printanière. Il m'est alors revenu un souvenir amusé.

Si cette place du quatorzième arrondissement de Paris est connue pour sa réplique de la statue du Lion de Belfort, qui symbolise la résistance héroïque du colonel Denfert-Rochereau face aux troupes prussiennes au moment du siège de Belfort, et pour l'accès aux catacombes qui se fait par les anciens bâtiments des fermiers généraux de la barrière d'Enfer, elle reste aussi, comme quelques autres rond-points de la capitale, encore couverte de pavés de granite usés et polis sous le double effet du passage de millions de véhicules et de l'érosion liée au temps et aux intempéries. Ce revêtement la rend très glissante lorsque le sol en est mouillé.

Au tout début des années 80, je roulais au volant d'une Coccinelle blanche. Comme sa cousine proche (si! si!), la Porsche 911, le moteur était situé à l'arrière, déséquilibrant l'automobile et rendant la tenue de route parfois un peu aléatoire.

Lieu de passage quasi-obligé pour rejoindre la  banlieue de ma jeunesse, traction, poids du moteur installé en porte-à-faux à l'arrière, chaussée rendue glissante par la pluie... Tu vois sans doute, cher lecteur, où je veux en venir. Les contingences sécuritaires de l'époque n'étaient pas celles  d'aujourd'hui.

Musiques du Bus à fond sur le radio-K7 auto-reverse Pioneer (à la pointe musicale et technologique de l'époque...) pour couvrir les rugissements du moteur 1300, il m'est arrivé, je le confesse, de faire plus d'une fois par temps humide, au milieu de la nuit, des tours de la place en cherchant la limite de l'adhérence, pour mettre volontairement la "Cox" en travers, à l'heure où la circulation parisienne s'était heureusement faite beaucoup moins dense. 

Vus de loin, mes passagers (il y'en avait parfois...) et moi, nous devions - la coupe de cheveux en moins - un peu ressembler aux héros de Wayne's World, reprenant à tue-tête Bohemian Rhapsody

Bien avant la mode du drift et des rodéos sauvages du samedi soir inspirée par la passion débordante de certains pour les films de la série Fast and Furious, ces tours de manège d'enfer qui, après tout, respectaient la limitation de vitesse en vigueur à cette époque, nous paraissaient alors bien insouciants. Et même si je reconnais rétrospectivement leur dangerosité, ils n'ont fort heureusement jamais eu alors plus grave conséquence que de nous faire tourner un peu la tête et de nous rendre plus joyeux.

Ne raconte jamais cette anecdote aux enfants. Je nierai farouchement son authenticité et n'en reconnaîtrai rien. Et puis, de toutes les façons, ils ne croiraient pas que nous avons, nous aussi, un jour pu être jeunes... 

Pourtant ! Qu'est-ce qu'on a pu se marrer alors en dérapant, en toute insouciance, sur ces pavés parisiens.

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