lundi 15 mars 2021

Il suffit d'un rien (bis)

On entend parfois dire, dans une forme de truisme frappé au coin de ce qui semble à beaucoup être une manière de bon sens, qu'il n'est rien de tel que de voyager pour voir du pays. Pourtant l'esprit de l'homme est ainsi fait qu'il le porte parfois bien loin dans le temps et l'espace. On pourrait même dire que nous ne sommes réellement présent que là où le désir profond de notre âme ou la puissance de nos songes nous entraînent.

Depuis un an, à l'exception notable des vacances estivales, j'ai très peu quitté les murs de la quasi-cellule qu'est devenu mon bureau, ou alors c'était pour me déplacer d'une pièce à l'autre, dans la maison. Certains pourraient être tentés de penser que, pendant toute cette période, si nous avons été tenus éloignés du monde, c'est le monde qui est venu jusqu'à nous, tant nous sommes, plus que jamais auparavant ne l'avait été l'humanité, des êtres "connectés". Mais ça n'est pas de village global que je souhaitais t'entretenir, mais bien plutôt de voyages immobiles.

Plus simplement, quand je convoque le souvenir des douze derniers mois, j'ai l'impression d'avoir tout fait sauf du sur-place. Et, à l'effet qu'il ne puisse y avoir la moindre méprise entre nous, cher lecteur, entends-moi bien, je ne cherche pas ici à décrire une expérience de décorporation ni même l'un de ces voyages astraux chers à certains ésotéristes. Pas d'extase chamanique, ni transe, ni usage intempestif de produits psychotropes dans mes expériences intérieures. Et d'ailleurs, je ne crois ni à la décorporation ni au don d'ubiquité et j'ai bien trop peur de l'addiction pour user des drogues à la mode. Je me contente d'un verre de bon vin de temps à autre. 

Non, plus simplement, en relisant quelques-uns des courts textes que j'ai rédigés au long de ces temps confinés, je m'aperçois que l'écriture a constitué un très sûr moyen de déplacement vers d'autres lieux, d'autres temps, d'autres mondes. Une autre vision de la réalité du monde. Un autre monde... Comme une prise de conscience encore plus explicite que la carte n'est pas le territoire.

Un air entendu, une image aperçue, quelques mots d'un texte sont parfois plus utiles à nos transports qu'un billet de train, d'avion, une pilule ou un champignon. Même digitalisée, même distanciée, tant que nos esprits restent libres, la vie reste la vie.

Il suffit souvent d'un rien pour stimuler une imagination qui ne demande qu'à se mettre à l'œuvre. Et si on partait ?

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire