Cioran
mardi 18 juin 2024
Rien n'est moins sur
dimanche 16 juin 2024
Rien ne justifie le choix de l'extrémisme
La phrase de Jacques Chirac nous rappelle que la véritable grandeur d’une nation ne réside pas seulement dans la puissance de ses armes ou dans la justesse de ses lois, mais dans sa capacité à se préserver des extrêmes, à maintenir l’équilibre entre les forces opposées et à croire en son destin.
La France, cette vieille dame au visage marqué par les siècles, la patrie des lumières et des droits de l'homme, mérite mieux qu'un choix mortifère entre réaction et révolution. Elle mérite une voie qui, au-delà des passions et de l'affrontement, cherchera toujours l'édification d'un avenir commun et partagé, dans l'harmonie des différences, à l'effet de créer une société où chaque individu, chaque génération, chaque voix, trouvera sa place. Nous devons rester fidèles à cette idée de la République, non comme un simple mot, mais comme une réalité vivante, une force qui, dans son essence, incarne aux yeux des nations les valeurs d'un humanisme à la française, celui qui, en rappelant avec clarté le principe de laïcité, s'incarne dans les idéaux de liberté, d’égalité et de fraternité.
Loin des tumultes de l'actualité, je contemple le vaste horizon de l’histoire humaine. Là, dans ce théâtre de la confrontation des idées, je me reconnais dans ceux qui ont cherché à trouver un juste milieu, une voie qui transcende les extrêmes, qui élève l’homme au-dessus de ses instincts les plus bas. C’est dans cette quête que réside la véritable grandeur d’un peuple, dans sa capacité à se dépasser, à trouver une harmonie entre ses désirs et ses principes, ses aspirations et la confrontation à la dure réalité du monde.
Dans quinze jours, il faudra voter. Alors, en ce moment charnière où les choix se dessinent avec une douloureuse clarté, rappelons nous que la première force d’une nation c'est sa sagesse, sa capacité à rester unie dans la diversité, à lutter contre les tentatives délétères du repli sur soi et du communautarisme, et, à défendre ses valeurs avec courage et conviction. Entre des nationalistes qui attisent la haine de l'autre et des mondialistes mus, pour certains, par la détestation de la patrie, il y a une place pour ceux qui aiment la France et croient à l'universalisme de son message. A l'heure où nombreux sont ceux qui, parmi les plus jeunes, doutent du système démocratique (selon un récent sondage, près de la moitié des 18/24 ans ne considèrent pas comme "très important" de vivre dans un pays gouverné démocratiquement!*...), c'est le sens même du combat pour la République, laïque, une et indivisible, que, même si j'ai conscience qu'il est désormais en partie utopique, j'appelle aujourd'hui de mes vœux. N'en déplaise à ceux qui, sur les réseaux ou ailleurs, évoquent à son propos de "vieilles soupes...", en 1995 j'ai pleinement adhéré au discours prémonitoire sur la fracture sociale et la menace qu'elle faisait porter sur l'unité nationale. Chiraquien j'ai été, Chiraquien je reste, parce que c’est dans cette fidélité à nos idéaux républicains et démocratiques que se trouve la véritable essence de notre être commun. Ensemble, portons haut les couleurs de la raison et de l’unité, pour que cette France que nous aimons tant, demeure, aux yeux du monde qui nous regarde, l'un des phares qui montre un chemin possible d'unité et de concorde dans la tempête cruelle et terrible des passions humaines. Rien ne justifie le choix de l'extrémisme et du renoncement à nos idéaux démocratiques. Rien.
(*) Enquête publiée le 3 février 2022 par les sociologues Olivier Galland et Marc Lazar pour le compte de l’Institut Montaigne.
jeudi 6 juin 2024
Rien oublier
mardi 7 mai 2024
Ne rien regretter
lundi 8 avril 2024
Rien ne va s'arrêter
" Au-delà de cette voûte étoilée, qu'y a-t-il ? De nouveaux cieux étoilés. Soit ! Et au-delà ? L'esprit humain, poussé par une force invisible ne cessera jamais de se demander : Qu'y a-t-il au-delà ? Veut-il s'arrêter soit dans le temps, soit dans l'espace ? Comme le point où il s'arrête n'est qu'une grandeur finie, plus grande seulement que toutes celles qui l'ont précédée, à peine commence-t-il à l'envisager que revient l'implacable question et toujours, sans qu'il puisse faire taire le cri de sa curiosité."
Louis Pasteur
mercredi 27 mars 2024
Rien, et encore moins
"Il y a deux tragédies dans la vie : l'une est de ne pas satisfaire son désir et l'autre de le satisfaire."
Oscar Wilde
mercredi 6 mars 2024
Rien sans corps
"Nous habitons notre corps, bien avant de le penser."
Albert Camus
Sommes nous dans notre corps ou sommes nous notre corps ? La question de notre existence en tant que corps ou entité indépendante de celui-ci est une question philosophique complexe qui a alimenté les débats depuis des siècles et est aujourd'hui particulièrement mise en lumière par les interrogations de notre époque sur la sexualité et l'identité de genre.
Notre corps est d'abord un véhicule, un capteur sensoriel à travers lequel nous expérimentons le monde. Il est l'instrument par lequel nous ressentons, agissons et interagissons avec notre environnement. Sans notre corps, notre existence dans le monde physique serait impossible. Nous sommes ancrés dans le monde grâce à notre corps qui contribue à notre connaissance de la réalité, et, notre identité est largement façonnée par l'expérience sensorielle et cognitive inscrite dans nos cellules.
L’idée que nous ne serions rien sans notre corps suggère une interdépendance fondamentale entre notre être et notre enveloppe corporelle mais l'affirmation que nous ne serions qu’un corps mérite certainement d'être nuancée tant la construction de notre identité transcende également ces limites physique. De nombreuses traditions philosophiques et religieuses suggèrent en effet l'existence d'une dimension plus profonde de l'être, parfois appelée âme, souffle vital, esprit ou conscience. Cette dimension transcende notre simple enveloppe charnelle et est souvent considérée comme immatérielle et éternelle.
Ainsi, bien que notre corps soit indubitablement essentiel à notre existence dans le monde matériel, notre identité va bien au-delà de notre simple anatomie. La conscience, la pensée et la subjectivité définissent notre être au-delà de la simple enveloppe corporelle. Ainsi, nous résidons dans notre corps en tant qu'entités conscientes, mais notre essence s'étend au-delà de ses frontières matérielles, explorant les profondeurs de l'existence au-delà de la chair et des os. Etres spirituels, nous sommes des créatures complexes, mêlant nos expériences sensorielles et cognitives à des perceptions plus intangibles et souvent inconscientes. La dualité entre le corps et l'esprit ne cesse d'inspirer la réflexion philosophique, invitant chacun à explorer la nature profonde de son être et à se questionner sur le sens même de l'existence humaine.
La complexité de l'identité corporelle s'étend bien au-delà de la simple enveloppe physique, évoluant dans une mosaïque d'influences psychologiques, sociales, culturelles et temporelles. L'affirmation chère à certains et aujourd’hui largement répandue selon laquelle "rien ne définit l'identité d'un corps" nous invite à une exploration métaphysique de la nature de notre être, défiant les catégorisations rigides et soulignant la profondeur de notre existence incarnée.
Le corps, loin d'être une entité biologique isolée, devient
une manifestation où se déploient les expériences existentielles, les
interrelations sociales et les récits culturels. L'identité corporelle se
modèle ainsi par des forces psychologiques, façonnant la manière dont nous nous
percevons, intégrons les expériences vécues et naviguons dans notre propre
réalité physique. Les normes esthétiques, les idéaux de beauté et les pressions
de la société participent de la construction de l'image que nous souhaitons donner de
nous-mêmes.
La dimension sociale joue un rôle essentiel dans cette
construction. Les relations interpersonnelles, les dynamiques familiales et
les liens communautaires contribuent à la définition de notre identité
corporelle. Les normes culturelles et les attentes sociales exercent une
influence subtile mais puissante, créant un écheveau complexe de significations
et de rôles attribués au corps dans divers contextes.
L'identité corporelle est, de surcroît, indissociable de la
temporalité. Tout au long de la vie, le corps subit des métamorphoses, de la
naissance à la vieillesse, chacune de ces phases s'accompagnant de
modifications physiques, psychologiques et émotionnelles. Les moments
marquants de l'existence, tels que la maladie, la maternité ou des événements traumatiques, tant psychiques que physiques,
laissent des empreintes profondes sur la manière dont nous interagissons avec
notre propre corporéité.
Si, dans ce contexte, l'affirmation selon laquelle "rien ne définit l'identité d'un corps" peut être la source d’une réflexion approfondie sur la fluidité et la transcendance des catégorisations préconçues, prenons conscience qu'elle peut aussi encourager certains, en repoussant la part la plus la plus irrépressible dans le social que constitue notre sexe, à considérer l'identité corporelle non pas comme une entité statique, mais comme une réalité fluide, en constante évolution, défiant ainsi les contraintes conventionnelles.
Au-delà de la question du genre, je t'invite, cher lecteur, à élargir la focale au thème du transhumanisme. Les avancées technologiques et médicales
contemporaines, telles que les transplantations d'organes, la bio ingénierie, les prothèses connectées tout autant que les altérations corporelles volontaires (tatouages, scarifications, implants...) ouvrent la porte à un fascinant questionnement philosophique. Comment ces modifications somatiques influent elles sur la continuité de l'identité ? Peut-on redéfinir notre essence à travers des
interfaces technologiques ou des modifications de notre représentation physique ? Ces interrogations transcendent les frontières
traditionnelles de la métaphysique, incitant à explorer la coévolution de la
technologie et de l'identité humaine.
Nous sommes tout à la fois notre corps et bien plus que lui. Toute réflexion élargie sur l'identité corporelle invite à une observation plus profonde de notre existence. Et, si elle souligne sans doute la nécessité d'embrasser une vision plus nuancée et inclusive de l'identité, prête, comme l’a écrit la philosophe et psychanalyste Anne Dufourmantelle dans son livre, Eloge du risque*, à accueillir l'émergence d'une réalité corporelle aux contours redéfinis où, d’un corps qu’il a - un corps ressenti, perçu - l’individu pourrait demain (se) faire le corps qu’il est - un corps voulu et désiré -, véritable " espace en devenir d’un sujet lui-même à venir", prenons cependant garde au risque existentiel pour notre Humanité que, dans un fol élan démiurgique soutenu par une idéologie individualiste radicale et déconstructiviste, certains ne parviennent un jour à mettre en œuvre leur délirant projet de décréation du monde pour pouvoir "mieux" le recréer. Car quand, demain, les évolutions de la morale et les progrès de la science auront repoussés les limites de tous les possibles, rendant probable l'autocréation de soi et une totale désincarnation, sans même évoquer la théorie de la "désincorporation" chère à mon ami Claude, le risque est lui bien réel que notre humanité ne soit un jour plus réduite qu'à rien, ni avec ni sans corps.
(*) Anne Dufourmantelle - Eloge du risque - Editions Rivages & Payot 2011